CONVERSATION (corpus Autopsie des indépendances)


IL - J'ai chanté vos louanges et vos exploits à travers le pays. Pourfendu soit-il, le présent avait été ce que le passé donna au futur. Que reste-t-il de mes mots, maudits-soit-ils, l'histoire je la racontait, la chantait, nous dansions autour d'elle, prenant syllabes et voyelles dans un nuage maintenant impalpable.


L'AUTREOù est-elle cette histoire ?


IL - Gravée sur les murs de vos rues, affichée par les pancartes, les noms, les hommages, peut-être même les livres, elle est dans nos esprits. Transmise, remise à jour, la nuit de nos rêves, les rêves de vos nuits, balancée par de case en case, par les fils electriques de la cité, la télévision, la radio. Je suis le griot du futur, transmuté, transformé, en transe, transatlantique, transparent. Le mots ricochent, les mots se noient, se perdent, différé par le temps, de temps à autre poussé par la houle, transportés par nos pirogues, elle est là. Dans les rues de medina, rtyhtmées par les thiantes nocturnues, au voix saturées par les micro mal réglés, grillé, prêt à exploser. Les enceintes crient ces histoires, singulières passées, reflet du présent, c'est dans la forêt sacrée que bat le coeur de ce-pays.


L'AUTREMais je ne la voit pas.


IL - Au fond de ma gorge se trouve ma voix, raisonnante, raisonné par vos maux, moralisateurs. Elle sort maintenant, elle attendu, l'indépendance, les indépendances, indépendemment de sa volonté, la voilà. Lat Dior, Kanga, Selassié, Sankara, Anta Diop, Bamba, Mame Diara. L'unique, un, le seul, la totalité, partiellement obstruée par l'attentat caché. Vois-tu ces personnages, nager, sur cette toile tissées par vos soins ? Vous m'avez mangé, tué, flingué, arrêté, paralysé, atténué, dilué, cassé, caché, enterré, pillé, sous-estimé, arraché, déchiqueté, piétiné, et maintenant vous m'autorisé.



L'AUTRENous n'avons rien fait.


IL - Les mots saignent, et se dispersent, s'ancre au chevet de vos pensées, ils vivent, sans moi, sans vous, sans nous, SANS RIEN. Passant les limites imposées par vos idées, ils se sont envolés, emportés, dégagé, ils ont survécus, ils vivent, se cotoient, sans moi, sans vous, persistant, accablants, militant, ils ressurgissent, isse, ici, si l'on veut, venu, nu, nulle ne peut les enfermer.


L’AUTRE - Vos mots ne sont rien, envolés, nous les avons brûlés.


IL - J'ai attrapé un mot, un son, en atteignant le fond de ma pensée. Je suis passée par mon nez, qui n'avait pas encore été mangé, alors je suis descendu, il faisant sombre, un fil m'a éclairé, en voulant l'attraper je me suis retrouvé la pendu, à cette bribe d'histoire, j'ai voulu la saisir, mais elle s'est évadé, alors j'ai continué de marcher, l'histoire est revenue vers moi, je l'ai cette fois-ci mâché, pour mieux la digéré, en la recrachant j'ai apperçu un mot, celui qui m'avait perdu, le héros, celui qui était déchu, celui que vous avez inventé, bricolé. Il était la transpirant la mort, comme si le fardeau qu'il portait, il ne pouvait pas l'assumer. Le griot est arrivé, armé d'un tirade pour le soulager.


L'AUTRE  - Qui est ce griot ?


IL - Celui des royaumes, des empires, celui qui a été forcé à raconter une histoire qui n'était pas la sienne, celui qui s'est senti obligé, celui qui a participé, celui qui a du déformer, celui qui ne pouvait plus chanter, celui qui s'est fait remplacé, celui qui.. celui qui.

Mark